Défaire les séquelles des violences

Physiques ou sexualisées, verbales ou psychologiques, les violences peuvent prendre différentes formes : insultes, menaces, coups, viols, chantage, humiliations, manipulations, harcèlement, outing, attouchements sexuels, propos haineux ou discriminants, cris, inceste, négligences, etc.

L’impact et les conséquences des violences subies dépendent de différents facteurs : l’intensité de l’agression, la surprise, la répétition dans le temps, le lien existant entre nous et la personne qui nous a agressé·e, le fait d’avoir déjà subi des violences par le passé, notre vulnérabilité au moment des faits, l’asymétrie du pouvoir, le soutien trouvé ou non depuis, etc. Ces conséquences peuvent être diverses : anxiété, état dépressif, sentiment d’insécurité, images intrusives et flash-backs, dérégulation émotionnelle, difficultés à être en relation, dissociation, syndrome de stress post-traumatique. Il est tout à fait normal d’avoir besoin de soutien pour y faire face.

Voici quelques axes qui me semblent importants à prendre en compte pour un travail en thérapie.

Un cadre de thérapie secure

Pour travailler sur les conséquences des violences que nous avons subies, nous avons besoin de nous sentir en confiance et en sécurité avec notre thérapeute, de pouvoir exprimer nos besoins et limites, et de constater qu’elles sont entendues. Nous avons besoin d’être cru·e, et de sentir que le/la professionnel·le qui nous accompagne n’évitera pas le sujet des violences et ne nous laissera pas tomber.

L’objectif d’une thérapie centrée sur les séquelles des violences est généralement l’intégration : c’est-à-dire pouvoir resituer les événements violents dans notre histoire de vie, sans être débordé·e par l‘émotion et sans être obligé de la couper. Sur le parcours, on va pouvoir appréhender et traiter les différentes conséquences. Le rôle de la/du thérapeute est de créer l’espace où ce chemin est possible, en favorisant la sécurité et l’autonomie de la personne accompagnée. Pour le reste, il y a énormément d’approches et de techniques différentes.

Parce qu’il s’agit de situations complexes, il peut être utile d’être accompagné·e·s par plusieurs professionnel·le·s : psychologue, praticien·ne en hypnose, psychothérapeute de différentes approches, médecin généraliste, psychiatre, ostéopathe, éducateur·rice, accompagnant·e communautaire ou travailleur·se pair·e, etc. Vous pouvez leur demander (si vous le souhaitez) de se mettre en lien pour vous soutenir au mieux.

Comprendre les mécanismes des violences et agir sur nos représentations

Dans un travail thérapeutique, il peut être intéressant de revenir sur les mécanismes de la violence et sur la façon dont elle s’est mise en place. Cela nous permet de remettre du sens, une chronologie, et de sortir de l’état de confusion. Par exemple en identifiant la stratégie mise en place par l’autre pour nous isoler, ou en observant le mécanisme de sidération qui nous a empêché·e de réagir.

Parfois, on sait consciemment que ce n’est pas de notre faute, et pourtant on ressent énormément de culpabilité. Il se peut qu’on trouve des justifications au comportement de l’autre, qu’on se fasse nous-mêmes des reproches, qu’on banalise les faits (ou que notre entourage le fasse). La thérapie peut nous aider à rendre sa pleine responsabilité à l’auteur·rice des agressions.

Il peut aussi être utile de reconnaître les conséquences des inégalités sociales sur les rapports de pouvoir et les violences qui en découlent. Par exemple, quand on est enfant ou en situation de dépendance, on est très vulnérable aux agressions. Les violences que nous subissons peuvent aussi être liées à des discriminations, comme le racisme, le sexisme, les LGBTphobies. Cela peut nous aider également de reconnaître ce qu’il y a de commun entre notre vécu et celui d’autres personnes, comme par exemple les spécificités des violences conjugales ou de l’inceste. Pour cela, les associations, collectifs, groupes de parole de victimes peuvent être d’un grand soutien.

Un autre aspect du travail en thérapie pourrait être d’identifier les différentes conséquences des violences subies. Parfois c’est très soulageant de comprendre que certains symptômes ne viennent pas d’un « défaut » de notre personne, mais sont bien les conséquences d’une situation vécue. Par exemple, connaître le fonctionnement de la mémoire traumatique ou du mécanisme de dissociation, identifier les stratégies d’évitement ou le déni mis en place sans nous en rendre compte, ou faire le lien entre nos difficultés relationnelles au présent et des événements non digérés du passé. Le but ici est de permettre de nouveaux fonctionnements, de rouvrir d’autres chemins possibles, avec douceur et progressivité.

Apprivoiser nos émotions pour les désensibiliser

Parfois les émotions ont été tellement intenses qu’on a dû apprendre à les couper, à les anesthésier, et avec le temps on ne sait plus vraiment comment faire pour les contacter. Parfois il y a tellement d’émotions mélangées que nous ne les comprenons plus vraiment et c’est comme un magma confus dans lequel nous sommes perdu·e·s. Et parfois, ça peut exploser et nous déborder, sans rapport apparent avec la situation, et nous nous sentons hyper sensibles, hyper réactif·ve·s, comme si nos propres émotions étaient devenues des envahisseurs hostiles.

Toutes ces formes de dérégulations émotionnelles sont des conséquences « normales » (c’est à dire fréquentes) des violences subies. Une partie de l’approche thérapeutique peut porter sur ce mille-feuilles d’émotions empilées, en approchant chaque couche avec douceur pour lui permettre de s’exprimer et de se dénouer. Dans les premières couches accessibles se trouvent souvent la honte et la culpabilité, qui peuvent aussi à leur manière protéger les couches du dessous encore plus douloureuses : l’impuissance, la terreur, la colère, le dégoût, le désespoir.

Le but ici va être de petit à petit donner sa place à chacune pour pouvoir désensibiliser, comme si on autorisait les noeuds à se défaire, les sacs à se vider. Cela demande aussi d’apprendre à réguler, c’est à dire à se connecter à nos ressentis, à nos sensations, tout en étant capable de s’extraire lorsque c’est trop dur, jusqu’à ce que notre zone de tolérance s’élargisse. L’envie d’éviter la souffrance est un réflexe tout à fait normal, mais c’est aussi parfois un obstacle aux soins : pour désinfecter une plaie il faut pouvoir la toucher. Et parfois la première étape c’est déjà de l’observer.

Il est parfois essentiel pour ce travail d’apprendre (ou réapprendre) à être bienveillant·e avec soi-même, à développer notre auto-empathie : pouvoir s’accueillir sans jugement, sans impatience, avec le même regard positif et soutenant qu’on sait parfois mieux donner aux autres qu’à nous-mêmes. Il s’agit aussi de recréer un lien à soi et un sentiment de sécurité intérieure, qui nous permettra d’avancer sur la suite de parcours.

Et reconstruire

Une thérapie centrée sur la réduction des conséquences des violences subies peut impliquer des changements profonds sur la vie au présent. Parce que ce parcours nous aura ouvert de nombreuses portes, il peut aussi nous amener à ré-interroger nos relations aux autres, à l’intimité, à la sexualité, à l’image de soi ou à l’identité.

En apprenant à redéployer une estime de soi plus saine, nettoyer des blessures qui peuvent enfin cicatriser, nous apprenons aussi à faire évoluer notre environnement et notre place dedans d’une façon plus juste. Par exemple un travail sur les violences subies dans l’enfance peut nous permettre une meilleure affirmation de soi, ou de faire évoluer les relations perçues comme toxiques dans notre entourage. l’espace thérapeutique peut également être un soutien à ces transformations.

Mon approche des questions de violences

Les questions de violences ont fortement marqué ma trajectoire personnelle et occupent une place centrale dans ma vie professionnelle comme bénévole depuis plus de 20 ans. Je les ai abordé à la fois par mes activités de conseiller conjugal et familial, de formateur d’autodéfense, d’animateur en santé sexuelle et d’hypnothérapeute, ainsi que par mes engagements militants en faveur d’une société plus égalitaire.

Je travaille en particulier sur les violences sexuelles / sexualisées, l’inceste, les violences au sein du couple et des relations d’emprise, les violences contre les enfants, notamment au sein de la famille, la maltraitance, ainsi que sur les violences liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre (LGBTphobies). J’accompagne des personnes sur ces sujets, que ce soit sur des demandes précises et ponctuelles ou en thérapie plus suivie. J’anime également des groupes de parole, des actions de sensibilisation et de formation à destination des professionnel·le·s et des collectifs, à la fois sur la prévention des violences, sur les réactions en cas d’agression, et sur la prise en compte des conséquences pour les victimes comme pour les auteur·e·s.

Quelques pistes de travail sur les séquelles des violences

Chaque personne est différente et chaque accompagnement unique. Certaines séances passent principalement par la parole : il peut s’agir de mettre des mots et se sentir que quelqu’un·e peut les accueillir, de les utiliser comme une manière de sortir les choses de soi, pour mettre un peu plus de distance. En RITMO et en EMDR on utilise des stimulations bilatérales pour favoriser un retraitement des informations traumatiques, et permettre aux souvenirs de se « ranger » dans une mémoire biographique qui appartient au passé et ne se réactive plus avec la même intensité.

En hypnose on peut passer par le corps pour se défaire des empreintes, par exemple la sensation d’un contact resté sur notre peau ou d’un poids sur notre poitrine. On peut passer également par nos images, nos métaphores, nos représentations intérieures, pour les réparer : reconstituer notre bulle ou notre jardin secret, nettoyer notre maison, réparer les fissures, sentir ce qui se recolle, se consolide. On peut aussi revisiter des souvenirs pour y apporter des ressources qu’on n’avait pas à l’époque, pour vivre des scénarios réparateurs, et ainsi modifier les traces au présent : par exemple en venant consoler la personne que nous étions juste après l’événement, ou en intervenant pour l’aider. En travaillant à partir des différentes parts de soi, on peut aller reconnecter à cette partie blessée qui est restée coincée dans l’événement, pour enfin prendre soin d’elle et la ramener dans un espace de sécurité.

Le meilleur projet d’accompagnement est celui qui vous convient.

Des ressources à Marseille

Le Planning Familial, des conseillères et conseillers pour une écoute gratuite et confidentielle.

Pour un soutien socio-juridique mais aussi psychologique, différentes associations existent et assurent des permanences : le  CIDFF (Centre d’Information sur les Droits des Femmes et des Familles), Solidarité femmes 13, l’AVAD (Association d’Aide aux Victimes d’Infractions Pénales), Association Parole d’Enfant.

Des lignes d’écoute sont également à votre disposition : celle du Collectif Féministe Contre le Viol ou de SOS Homophobie par exemple.

Pour l’accompagnement des auteur·e·s de violences, l’association La Durance propose des thérapies individuelles ainsi que des groupes.